Dans la discothèque de COUACS #90
Dimanche 2 février 2025 - Quelques nouveautés et rééditions de la semaine.
Des rééditions pour commencer !


Erato réédite en numérique un disque de concertos pas banals de Marius Constant : pour cor, pour orgue de Barbarie, pour saxophone, et pour trombone ! Les interprètes ? Andy Emler (piano), François Moutin (basse), Jean-Jacques Justafré (cor), Pierre "Tiboum" Guignon (percussions), Pierre-Marie Bonafos (saxophone), Pierre Charial (orgue de barbarie), Claude Delangle (saxophone), Michel Becquet (trombone). Cela rappellera une certaine époque aux boomers du classique. Marius Constant (1925-2004) était roumain d’origine, né à Bucarest, ce que son nom n’induisait pas immédiatement. Il fut un compositeur très expérimentateur et touche-à-tout. Il aura un peu tout essayé, avec une curiosité insatiable. Chef d’orchestre, fondateur de l’Ensemble Ars Nova, directeur de France Musique à l’époque où des musiciens dirigeaient France Musique, professeur de composition au Conservatoire de Paris il était une personnalité généreuse à tous égards. Et il savait écrire la musique ! Ses œuvres sont ici dirigées par Jérôme Kaltenbach à la tête de l’Orchestre Symphonique et Lyrique de Nancy qu’il dirigeait alors. J’en profite pour signaler également la réédition d’un autre disque Erato, celui-là dirigé par Marius Constant, consacré aux œuvres écrites de Martial Solal, qui vient de nous quitter, en particulier son Concerto pour piano, joué par lui-même.
Sous une pochette pas inspirante que je vous épargne (je me sers ici de de l’illustration de la couverture originale du disque Adès avec le beau dessin de Maurice Tapiero !) ), Universal nous avait rendu l’enregistrement, que j’adore, des Mariés de la Tour Eiffel, la seule œuvre collective du Groupe des Six (Georges Auric, Louis Durey, Arthur Honegger, Darius Milhaud, Francis Poulenc et Germaine Tailleferre) moins un qui faisait la gueule : Durey. Le disque date de 1966, fut réalisé sous la baguette de Milhaud avec l’Orchestre National, avec une distribution épatante. Il est complété de la réédition d’un disque de mélodies (Sauguet, Satie, Max Jacob, Milhaud) fort bien chantées par le duo Jean-François Gardeil / Billy Eidi auquel nous devons tant sur ces répertoires !
Des nouveautés :
Vous trouverez peut-être que j’aboie avec la promo en mentionnant ici le nouveau disque de l’Arpeggiata et de sa délicieuse animatrice Christina Pluhar ? Sous le titre “Alma Mater” , il s’agit rien moins que d’un Hymne à la nature, imaginé par Madame Pluhar. “ Une fusion de répertoire baroque, de musique traditionnelle et d'improvisations, une célébration vibrante de l'art vocal et instrumental, le tout sous la bannière de la terre nourricière.” On nous dit que la mezzo qui prête sa voix à ce programme, Malena Ernman, est par ailleurs une activiste de la défense de la nature. On aurait aimé aussi un featuring de Greta Thunberg tant qu’à faire. Non mais, je galége : elle chante très bien, Malena Ernman, c’est très réussi et s’écoute plus qu’agréablement du début, à la fin.
Un Requiem allemand de Brahms impressionnant, enregistré à Bergen sous la baguette de l’excellent et ambitieux Edward Gardner, pour Chandos avec en solistes Johanna Wallroth et Brian Mulligan. Que dire ? Pour les amoureux de cette œuvre en somme si peu religieuse et tellement émouvante, tout nouvel enregistrement est une fête, et je trouve celui-là particulièrement réussi, qui prendra place non loin de mon Sawallish de prédilection. Très belle prise de son et livret numérique impeccable.
Pour célébrer la restauration de l'orgue Klais de la Cathédrale du Saint-Sauveur à Bruges, Ignace Michiels a enregistré pour le très soigné belge Passacaille une sélection d'œuvres flamandes composées entre 1884 à 1961, qui permettent de faire sonner au mieux le beau joujou dont il est le chanceux titulaire ! Attendez-vous à découvrir les compositions d’artistes dont vous avez peu souvent croisé les noms : Joseph Callaerts (1838-1901), Flor Peeters (1903–1986), Herman Roelstraete (1925-1985), Edgar Tinel (1854-1912). Pas de livret. Pourquoi ?
Le Kaleidoscope Chamber Collective nous livre un bouquet de musique de chambre d’un compositeur qu’il faudrait extraire de l’anecdote. Les membres fondateurs de Kaleidoscope écrivent : "Kaleidoscope a défendu de nombreux compositeurs injustement négligés, mais dans le cas de Reynaldo Hahn, cette négligence nous semble particulièrement déconcertante. Sa musique est immédiatement accessible, d'une beauté vertigineuse et parle directement au cœur ; le public, lors des rares occasions où il peut l'entendre, semble l'adorer. Le Quintette avec piano figurait sur notre liste de souhaits de programmation depuis un certain temps : il a été salué comme la plus grande œuvre de Hahn lors de sa première en 1922, et la puissante intensité de ses deux premiers mouvements en particulier constitue une réponse ferme à ceux qui présentaient Hahn comme un compositeur de salon. Quant au Quatuor pour piano, de 1946, Hahn y paraît être un homme un peu égaré dans ce monde ; cette musique ne porte aucune trace de modernisme, regardant plutôt avec nostalgie l'âge d'or de Hahn, la Belle Époque"
Ludovic Morlot fait partie de ces chefs d’orchestre français qui font carrière ailleurs, et à qui cela semble réussir plutôt bien. Après avoir quitté Seattle où il avait réalisé une série de disques vraiment très notables nous le retrouvons à Barcelone où il semble vouloir continuer avec le label de l’orchestre le même genre de travail. Nous recevons le deuxième volume d’une intégrale des œuvres de Ravel : Fanfare pour l’éventail de Jeanne, Menuet antique, Shéhérazade, Trois poèmes de Stéphane Mallarmé, Valses nobles et sentimentales. Il embarque dans l’aventure Fleur Barron (Shéhérazade, Mallarmé) et Alexandre Duhamel (Don Quichotte). Grande réussite. A cette occasion, c’est une incise, j’ai réécouté le disque chez Hyperion où il dirigeait les deux concertos de Ravel avec Steven Osborne, qui relativise bien d’autres versions
Il y a 30 ans, quand sont parus les premiers disques du pianiste et compositeur suédois Niklas Sivelöv je lui aurais imaginé une carrière plus tapageuse. Il n’en à rien été, du moins dans nos contrées. C’est un artiste vraiment impressionnant, qui dispose d’une abondante discographie que je vous conseille d’explorer. On le retrouve dans cet album, avec la crème des artistes suédois morts ou vivants (Nicolai Gedda, Jussi Björling, Eric Ericson, Elisabeth Söderström…) dans un copieux hommage à Wilhelm Peterson-Berger (1867-1942) le grand compositeur post-romantique suédois. Une bonne introduction à son œuvre.