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COUACS.INFO #71
Mercredi 20 septembre 2023. Le disque classique est une ZAD. C’est un produit culturel qui ne peut plus coucher dans le lit de la variété aux conditions de la variété...
Le disque classique est une ZAD : zone à défendre. C’est un produit culturel qui ne peut plus coucher dans le lit de la variété aux conditions de la variété.
Bienvenue ici, dans la suite de mes réflexions sur le pourquoi et le comment d'une indispensable révolution dans le modèle du streaming musical affecté à la musique classique. Les trois textes de cette infolettre sont des extraits des trois parties de l’article intégral, réservé aux abonnés "PREMIUM".
Le disque de musique classique est un produit culturel à part entière, légitime, aussi respectable pour ses amateurs qu'un ouvrage de littérature. Le passage d’un système de vente « à la galette » à une offre forfaitaire par abonnement lui a été hautement préjudiciable sur le plan économique et a introduit un biais rédhibitoire. Nous ne pouvons plus admettre qu’il soit confondu dans sa logique autant éditoriale que commerciale avec un disque de variétés.
Le modèle généraliste du streaming depuis 15 ans a largement montré son ineptitude à proposer une rémunération correcte aux acteurs du disque spécialisé. Ce système n’est pas réformable ou adaptable en tant que tel. On ne peut plus raisonnablement attendre jusqu’à la Saint-Glinglin que le niveau des abonnements généralistes atteigne ce point rêvé où le classique retrouverait une part de revenus décente au global, de laquelle la redistribution serait encore à discuter avec les puissants du métier.
Le défaut de revenus du streaming pour la musique classique est posé clairement et depuis longtemps. Il est documenté et commenté.
Seuls des esprits déconnectés peuvent cependant contester au classique l’intérêt du streaming en tant que mode diffusion : il est un outil particulièrement bien adapté à un répertoire classique dont les fonds de catalogues sont gigantesques et se démodent bien moins que ceux de la variété. Le streaming, c’est la grande bibliothèque de nos savoirs musicaux. Les amateurs du répertoire classique doivent donc pouvoir bénéficier de ses opportunités et de ses usages. […]
2 - Le classique est, heureusement, le seul répertoire dont la taille critique peut autoriser des solutions spécifiques.
Seul le classique peut, sur le plan économique, faire l’objet d'un traitement particulier dans le domaine du streaming. Le classique est le seul genre qui présente des caractéristiques permettant de circonscrire facilement ses frontières : un répertoire singulier quoique large et très varié, une clientèle assez nombreuse, aux goûts distinctifs aisément repérables, disposée à payer le prix de sa passion quels que soient ses moyens (tout comme d’autres, de toutes conditions, acceptent de payer pour leur moto, la philatélie ou des baskets collector). Enfin, le classique représente un répertoire plus international, universel, durable, que tout autre.
En théorie, un service qui ne proposerait que le répertoire classique avec une démarche réellement qualitative résoudrait instantanément le problème de la rémunération des ayants-droit. Il pourrait faire payer plus cher pour un répertoire limité et 100% de ses écoutes étant classiques, l’ARPU (revenu moyen par utilisateur) serait magnifique.
Oui mais… Pour que la démonstration soit significative, il faudrait aussi que le service atteigne à une taille critique conséquente. Or, le coût de création et de maintenance d’une plateforme de musique en ligne et de ses applications est élevé, pour rester dans la course et conforme aux usages et aux règles de l’Art. Le travail juridique et administratif à réaliser est lourd, complexe, coûteux. D’autant plus si l’on est décidé à se battre pour faire bouger les lignes et trouver des zones de valeur ajoutée. Enfin, il est une part importante des amateurs de musique classique qui n’aiment pas être limités au classique. J’ai découvert un jour à l'époque ou je dirigeais Qobuz que les amateurs de musique classique étaient moins bornés qu’on ne l’imagine, surtout chez les gens qui veulent leur bonheur : en 2015 nos plus gros consommateurs de musique classique n'écoutaient jamais plus de 65% de leur genre de prédilection. Et encore, était-ce à une période pionnière, donc avec des clients sur-passionnés, du premier cercle.





3 - Observations mises à jour sur quelques exemples de services spécialisés et leurs particularités
Quand on observe le paysage des propositions de streaming et téléchargement existantes pour le classique, à l’évidence le service *** qui propose d’ailleurs deux répertoires spécialisés complets, le classique et le jazz, fait très bien le job. Il peut satisfaire un amateur de classique et/ou de jazz parce que ses animateurs savent à qui il parlent : à des clients aussi compétents et passionnés qu’eux, parfois davantage. Le mix et l’animation de *** sont habiles, entre les exigences du commerce, de leurs fournisseurs, et celles des clients d’un service spécialisé. Leurs interfaces sont propres et bien faites. Vraiment, ces gens sont à complimenter pour un travail qui semble avoir été engagé de longue haleine et n’avoir jamais renoncé à son exigence. Il est probable que leur ARPU est bon, d’autant plus qu’ils combinent téléchargement et streaming, comme ***. On leur souhaite le meilleur.
Un service à première vue comparable, *** est moins convaincant. L’outil de recherche n’est pas mauvais mais le catalogue est incomplet, limitant le libre arbitre. Le discours est infantilisant, prosélyte et simplificateur, anecdotique comme tout le monde se croit obligé de l’être aujourd’hui quand il s’agit de classique : chaque jour davantage on nous parle comme à des enfants peu doués et sans éducation. Bref on ne sait pas trop à qui pourrait parler en terme d’audience un peu nombreuse un service comme Vialma, au vu de la concurrence.
****est meilleur en relations publiques pour avoir des citations dans la presse qu’en toute autre chose. Le catalogue est court, le son ne va pas au-delà du 16bits / 44kHz c’est-à-dire la qualité CD, l’animation et le choix des mises en avant est abusivement servile à l’égard d’Universal, et la valeur ajoutée des concerts “live” qui occasionnent un abonnement plus cher est discutable. Il est bon qu’un service de streaming musical reste concentré sur l’objectif de fournir d’abord une bonne discothèque, et ce n’est pas vraiment le cas; le rapport qualité prix, par rapport à Apple Music par exemple, est mauvais.
À une autre échelle, le service *** théoriquement voué aux amateurs de classique et annoncé comme devant casser la baraque, ne sait nous parler dans sa communication que d’un répertoire relaxant, sans fournir les outils dont nous aurions besoin : imaginez un magazine gastronomique qui renverrait sans cesse à des sauces industrielles. Ce service est une donc un tiroir supplémentaire pas très utile au produit *** standard.
*** avait à son origine une particularité : ce service était ouvert à tous les répertoires mais avait à sa tête un gars du classique. […]
Conclusion jusqu’à la suite :
Chemin faisant, je me suis aperçu que mon sujet serait plus long que prévu, d’autant plus que je le souhaite complètement traité, bien classé et argumenté.
Il y aura donc d’autres parties à ces réflexion, et bien entendu des solutions concrètes et réalistes promises, longuement méditées, au retour de revenus dans l’escarcelle des producteurs de disques classiques.
Quand on débarque dans ces sujets, il faut bien comprendre une chose : une fois les parts de marchés découpées et prêtes à payer, les plateformes envoient aux ayants droit des comptes rendus de vente élaborés selon les critères fixés par les ayants droit eux-mêmes, qui ensuite reversent à leurs artistes ou à leurs licenciés les revenus qui leurs sont dus en fonction des contrats qu’ils ont signé. En sorte que ce sont les ayants droit qui ont le pouvoir, tout le pouvoir de changer les choses. Point à retenir pour la suite.
Qui résiste aujourd’hui aux petits fours des Majors (au temps du 33 tours c’était plutôt des allers-retours gratuits NYC au prétexte d’assister à la fausse séance d’enregistrement d’une vedette), et au cours magistraux qui suivront sur les objectifs de la rentrée donnés par un chef des ventes qui ne sait pas ce dont il parle ?
Las, la contamination par “le métier” du disque, dont les jeunes gens et les vieux crabes fatigués sont tellement heureux de faire partie (et cela a toujours été comme ça : le showbiz, quel Graal !), produit de la connivence et de la banalité. Les vieux disquaires à catogans qu’on a connus jadis dans les magasins savaient à l’inverse faire plaisir à leurs fournisseurs les plus puissants pour obtenir des remises conditionnelles, mais aussi, de leur propre chef, soutenir efficacement les productions les moins promues, qu’ils aimaient.
À SUIVRE !…
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ᴡᴡᴡ.ᴄᴏᴜᴀᴄs.ɪɴғᴏ
ᴇsᴛ ᴘʀᴏᴘᴜʟsé ᴘᴀʀ ʟᴀ ᴘʟᴀᴛᴇғᴏʀᴍᴇ sᴜʙsᴛᴀᴄᴋ.ᴄᴏᴍ, ᴄʀéée ᴘᴏᴜʀ ғᴀᴠᴏʀɪsᴇʀ ʟ’ᴇxᴘʀᴇssɪᴏɴ ᴅ’ᴜɴ ᴊᴏᴜʀɴᴀʟɪsᴍᴇ ᴅ’ᴇxᴘᴇʀᴛɪsᴇ ғɪɴᴀɴᴄé ᴘᴀʀ sᴇs ʟᴇᴄᴛᴇᴜʀs.